Lettre ouverte du 18 avril 2016 à l’attention de François Hollande, Président de la République française
Monsieur le Président, à l’occasion du XVe sommet de la Francophonie à Dakar, vous aviez déclaré : « La francophonie, elle est soucieuse des règles de la démocratie, de la liberté du vote, du respect des ordres constitutionnels et de l’aspiration des peuples, de tous les peuples, à des élections libres. […] Là où les règles constitutionnelles sont malmenées, là où la liberté est bafouée, là où l’alternance est empêchée, j’affirme ici que les citoyens de ces pays sauront toujours trouver dans l’espace francophone le soutien nécessaire pour faire prévaloir la justice, le droit et la démocratie. »
Monsieur le Président, je tenais tout simplement à rappeler toutes vos paroles qui renferment tous les acquis de notre liberté. Puis-je me demander, Monsieur le Président, si aujourd’hui vous regrettez d’avoir choisi ce mode de vie ou système comme étant approprié aux hommes de cette terre que nous sommes ?! Car, en observant ce qui est en train de se passer au Congo, sur toutes les deux rives, je me dis que c’est vraiment inadmissible.
Sachons d’abord que, la démocratie en Afrique est trop jeune et plus fragile. Ne craignez-vous pas les conséquences, si à votre niveau, vous ne réagissez pas de manière à la sauvegarder, à nous aider à l’accepter en tant que bon système ? Que penser lorsque nous apprenons que vous invitez le chef de l’Etat congolais, Kanambe alias Joseph Kabila, dont le pouvoir, pas plus tard qu’hier dimanche 17 avril 2016, a tué plus d’une dizaine de personnes à Kolwezi ? Il a déployé des chars partout. Au moment où je vous écris, la population ne sait plus si elle survivra encore dans les prochains mois. N’oubliez pas que nous vous avons déjà écrit à ce sujet.
Même au Congo de l’autre rive, la même chose. Imaginez-vous ! La maison d’un opposant ainsi que toute sa concession où dormaient sa famille et certains malades, ont été bombardées. Et à notre grand étonnement, nous voyons ce candidat-président qui se voulait être gagnant, se tenir debout pour prêter serment. La même personne, qui vient de violer la constitution, se tient debout devant ce peuple, lui jurant de ne point violer la constitution.
Et la communauté internationale, de laquelle nous attendions une réaction juste de jugement, s’est tue.
Monsieur le Président, vous rappelez-vous seulement vos paroles lors du sommet de la Francophonie à Dakar ? Vous leur aviez rappelé de ne point ajouter de mandat, de ne point modifier la constitution. Et voilà ce coup de théâtre, l’un de ces deux chefs d’Etat vient de prêter serment. Je ne sais pas si c’est prêter serment ou jouer la comédie. Est-ce que cela honore vraiment notre démocratie, cette démocratie pour laquelle la France s’est battue et a souffert ? Que sommes-nous en censés comprendre ? Cette démocratie est en train de nous mener vers le gouffre. Vous n’êtes pas sans ignorer que, mis à part la tuerie d’hier à Kolwezi, M Kanambe alias Joseph Kabila, a massacré les Congolais de manière incroyable. Les fosses communes dont il est accusé, se chiffreraient à une dizaine. Ceci ne nous étonne pas. Car en entrant, en tant que jeune soldat, lors de l’invasion rwandaise au Congo, il était le commandant Hyppolite Kanambe aussi surnommé commandant “Hyppo”. La sale besogne faite sur son chemin du Rwanda vers Kisangani, ce n’est pas à vous que je vais apprendre cela. C’est moi qui ai appris cela de vous. Vous aviez d’ailleurs demandé à Laurent-Désiré Kabila de faire une enquête sur ce massacre, sur ce génocide et Laurent-Désiré Kabila avait refusé. L’homme dont je parle, ce n’est pas un autre, c’est ce même que vous appelez Joseph Kabila. C’était là son premier massacre connu; massacre qui a fait suite à plusieurs autres et a abouti à cette odeur qui s’exhalait aux alentours de Maluku et pour laquelle la MONUSCO avait été appelée urgemment afin de constater. Ce n’est pas un secret. Cet homme est un criminel notoire à la face du monde. Ceci est bien connu de tous, et il est libre. Un criminel lourdement connu par le monde entier et que la communauté internationale laisse libre.
La communauté internationale que vous êtes, lui aviez demandé d’organiser des élections. Et, il a joué tout le jeu, jusqu’à ce que, en fin de compte, il y a quelques jours, la CENI, sa CENI déclare son incapacité à organiser des élections. Ici, je tiens à vous rappeler que je m’étais opposé à ce qu’il organise les élections. Comment pouviez-vous continuer à accorder les moyens à un criminel d’organiser des élections ? Alors Monsieur le Président, après avoir déclaré qu’il était incapable, nous avions demandé à la communauté internationale d’intervenir. Le pouvoir de Kanambe alias Joseph Kabila est démissionnaire depuis que la CENI a déclaré qu’elle était incapable. On ne doit pas attendre jusqu’à novembre ou décembre 2016 pour prendre des décisions ou agir.
Monsieur le Président, je vous demande de faire quelque chose pour nous encourager, nous qui sommes la jeune démocratie, une démocratie très fragile. Nous aimerions être encouragés par vous qui êtes des acteurs plus expérimentés en ce qui concerne ce système. Nous savons que vous observez mieux que nous. C’est vous qui observez beaucoup mieux, raison pour laquelle, ce serait encore plus choquant que ce génocidaire Kanambe alias Joseph Kabila puisse être reçu à l’Elysée comme pour défier le peuple congolais en disant : « vous mourrez mais cela importe peu ».
Nous avons beaucoup de considération pour la France. Ce ne serait pas bon pour l’image de la France, Monsieur le Président, que l’Elysée ou Matignon reçoive ce chef de l’Etat que l’histoire va rattraper.
Nous les Congolais, nous souffrons aujourd’hui parce que nous vivons ce que la France a vécu. Nous vivons l’occupation, l’occupation rwandaise. C’est pourquoi je crois que cela devrait surtout vous encourager à nous aider à sortir de cette tragédie. Parce que c’est une chose que vous surtout, avez connu. D’ailleurs, l’ambassadeur de France à Kinshasa avait également rappelé aux Congolais que la France avait connu une situation similaire.
Ce n’est donc pas une chose que la France peut accepter. Le Rwanda a toujours menti. Ce monsieur est en train de faire rentrer encore plus de Rwandais. Ils nous ont envahis, la population ne vit plus; elle ne respire plus.
Et comment ce pouvoir démissionnaire peut-il encore être considéré, reconsidéré par la France qui a souffert pour asseoir ce système dans lequel nous nous retrouvons aujourd’hui ? Ce que nous attendons, c’est l’enquête sur plus de 450 morts de Maluku. Je ne vois donc pas de raison d’inviter ce Kanambe, génocidaire. Ce que nous attendons de la communauté internationale, c’est une décision afin que nous puissions nous rassembler, pour qu’elle fasse l’arbitrage comme elle l’a toujours fait depuis plusieurs années. Ce n’est pas une chose nouvelle. Ce que nous avons demandé, c’est nous aider à mettre en place un gouvernement de transition dans lequel ce génocidaire n’est pas concerné, ni toute son équipe.
Ce ne sera pas bon, M Le Président, que le gouvernement français puisse recevoir ce chef de l’Etat que l’histoire va rattraper. Ce que vous devriez par contre comprendre, c’est que lui n’est pas le Congo avec lequel vous devriez traiter. Pourquoi la France n’attendrait pas que soit mis en place le gouvernement de transition ? Il n’a plus droit d’être reçu par l’Elysée. De grâce, veuillez nous encourager à exercer cette démocratie. Et surtout, la démocratie ne peut pas s’exercer en brousse. Ces dictateurs, sur la terre du Congo dans son ensemble, ont fait du Congo une jungle mais nous aimerions qu’un état de droit puisse s’y constituer afin de permettre à nous les Congolais de vivre réellement dans la liberté, liberté pour laquelle la France s’est battue.
Aussi longue que la nuit soit, l’aurore finit toujours par arriver. On ne doit pas reculer mais on doit avancer. Nous Congolais, sommes aujourd’hui assassinés au jour le jour; comme ça a été le cas hier à Kolwezi. Je crois que Dieu créateur qui nous a créés, qui a créé les Congolais, va se mettre debout et exiger le jugement.
Pour terminer M le Président, ce serait pour nous une consolation que vous ne puissiez pas cautionner cette tragédie incomparable de la RDC, causée par l’invasion rwandaise. Pensez aux morts français tombés pendant l’occupation connue par la France qui avait obligé le général De Gaulle à pouvoir se retrouver à Brazzaville, au Congo et qu’il va déclarer comme étant la capitale de la France-libre.
Que ce grand Dieu, Yahve Nissi, mette fin à l’occupation rwandaise.
Joseph Mukungubila Mutombo
Prophète de l’Eternel